Les vœux du marquis (01/01/2019)
« Le jour de l’An, le suzerain allait de porte en porte présenter ses vœux aux ouvriers et aux fermiers » Le singulier personnage dont il est question ici défraya la chronique sous Louis XV. « Son rigorisme égalitaire lui fit congédier son portier qui, par respect, n’avait osé lui faire vis à vis à table » nous apprend Gérard Oberlé dans un article sur le Marquis de Brunoy (1748-1781) paru dans Lire en novembre 2015.
Héritier d’une fortune colossale, Armand de Brunoy de Montmartel ne se distingua pas seulement par ses tendances démocratiques et sociales qui firent le désespoir de sa famille. Non content de pourvoir aux besoins élémentaires (et aux festins) des habitants de sa paroisse, « il dotait les jeunes mariées et dépensait des sommes ahurissantes pour l’accoutrement des domestiques. Pas de baptême à Brunoy dont il ne fut le parrain, un privilège qui suscita une flopée de bébés prénommés Armand et Armande » note Oberlé.
Celui-ci qui s’appuie sur un livre paru en 1805 (Les Folies du marquis de Brunoy, ou ses mille et une extravagances) souligne que, pour sa part, Armand de Brunoy affichait des goûts rustiques : « il portait des vêtements usés et déchirés, se lavait rarement et arborait une chevelure épaisse qu’il ne peignait jamais ».
Il semble que ce comportement spécial ait été une manière de protestation contre la Noblesse de son époque qui l’avait méprisé. Mais c’est surtout par une thanatophilie prononcée que le Marquis de Brunoy mérita de passer à la postérité.
Dans le domaine des pompes funèbres, il atteignit en effet à des sommets dignes d’un happening contemporain. Suivons une dernière fois Oberlé sur ce point. « Le jeune homme raffolait (…) des cérémonies religieuses (…). Lors des obsèques de son père, il fit verser des tonneaux d’encre dans la rivière, l’Yerres, et dans les pièces d’eau du jardin de Brunoy. L’église fut peinte en noir, les statues et les arbres enveloppés de crêpe, les chevaux, les vaches et les poules furent noircis pour la circonstance ».
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