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Hrabal et l’art du rail

A la mort de son oncle, cheminot à la retraite qui faisait fonctionner une locomotive dans son jardin, Hanta, le narrateur d’Une trop bruyante solitude, le roman de Bohumil Hrabal, ouvre un placard… « La collection était bien là, cette collection que mon oncle me montrait si souvent sans provoquer mon intérêt, des boîtes remplies de ferraille multicolore ; quand il travaillait à la gare, mon oncle s’amusait souvent à mettre sur les rails de petits bouts de cuivre, de laiton, de fer, d’étain et d’autres métaux encore ; après le passage d’un train, il ramassait des formes bizarres et martelées qu’il assemblait le soir, en cycles ; chaque fragment avait un nom selon les associations d’idées qu’il faisait naître, on aurait dit une collection de papillons d’Orient, des boîtes de bonbons vides, pleine de papier d’aluminium bariolé. Je les versai, une à une, dans le cercueil de mon oncle, le recouvrant de cette précieuse quincaillerie, les croque-morts fermèrent le couvercle, et mon oncle put reposer comme un haut-dignitaire (…) ».

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Les personnages de Hrabal sont appréhendés par de menus détails, féroces et tendres, avec un poil d’amusement, toujours bienvenu. Quelque chose de malicieux et de désenchanté - à l’équilibre. On passe ainsi, avec fluidité, du burlesque à l’humour noir, de la contingence de la misère humaine à la superbe des gens de rien.

Hanta travaille par exemple dans une cave sordide avec une vieille presse en surchauffe permanente. Sa fonction : détruire livres, papiers & emballages en divers genres et former de gros cubes de papier recyclé qui s’en repartent on ne sait où. Mais Hanta est du genre revêche, son patron le trouve tire-au-flanc.

Il ne peut s’empêcher de lire, grappiller et sauver certains imprimés de la destruction. Pour se venger du destin, il insère avec délectation -façon mille-feuilles- dans un lot de littérature de propagande nazie ou dans des emballages de boucherie putrides les plus belles pages des philosophes éternels.

Dans la vraie vie, Bohumil Hrabal écrivait assez peu à l’intérieur de son logis.

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 Plutôt qu’une table de cuisine dont on débarrasse les restes à la hâte ou un bureau d’écrivain, encombré de livres et de paperasses, Bohumil préférait le toit de sa maison. Il y avait installé une ingénieuse petite table tenant à l’horizontal grâce à deux pieds taillés pour la pente. Quand son séjour en plein air s’éternisait, sa femme lui faisait passer boissons et victuailles par la lucarne au moyen d’un panier ! Ainsi perché, c’est la ville de Prague qui se déployait sous ses yeux.

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