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Matières plastiques

  • Jean Bordes retrouve Galey

    A Galey dans l’Ariège, le temps de Bordes est venu. C’était samedi la Fête de la pomme et jusqu’au 4 novembre 2018 le village célèbre un de ses plus créatifs enfants.

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    Jean Bordes (1916-1985), sa vie durant, à côté d’occupations nécessaires (foins, vaches, fagots), s’adonna à la recherche d’objets brisés et abandonnés à la décharge dont il faisait, par ligatures, d’étonnants assemblages, tenant du jouet et de la sculpture moderne. Œuvres dépourvues de toute autre utilité qu’artistique. Sécrétions pure d’une intelligence des mains autant que du cœur.

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    Elles sont aujourd’hui à l’abri à La Fabuloserie de Dicy dans l’Yonne. C’est à Jano Pesset d’Orgibet, un village voisin de Galey qu’on le doit. A la disparition de Jean Bordes, il fit mentir l’adage selon lequel nul n’est prophète en son pays. Promises au néant par necessité de remise en ordre, les pièces de Jean Bordes, témoignant de son génie du recyclage, trouvèrent leur destination.

    jean bordes portrait.jpgL’ancienne mairie de Galey avec cette exposition de photographies, de textes et de documents porte l’éclairage sur ce personnage captivant, d’une élégance « mal fagotée » mais qui œuvrait comme un oiseau fait son nid.

    Peu de littérature jusqu’à présent lui a été consacrée. Mis à part l’article de Pesset dans le numéro 11 de la revue L’œuf sauvage en 2012 auquel j’emprunte le portrait de monsieur Bordes,

     

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    on peut signaler celui de Jean-Louis Lanoux (Jean Bordes ou l’art de fagoter) paru dans le numéro 2 de la revue Création Franche en 1991.

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    L’exposition de Galey promet des témoignages de ses habitants. Une collecte qui s’imposait.

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  • Jacques Pascal et ses Pétètes

    Jacques Pascal : un nom tout simple qui mérite d’être retenu. Dans la Galerie des hommes non-illustres qu’on aime à arpenter ici, ce tailleur de pierre a toute sa place. Auprès de François Michaud notamment, le maçon de la Creuse, qu’il précède de près d’un siècle. Comme Michaud, Pascal appartient à cette confrèrie anonyme des sculpteurs qui œuvraient dans leurs communautés rurales sans avoir appris les règles de l’art en vigueur de leur temps, ne se fiant qu’à leur instinct de créateurs servis par une habileté manuelle développée par leurs activités laborieuses. Si Michaud fut le serviteur de son village qu’il ornementa à partir de sa maison, Jacques Pascal trouva dans un modeste édifice religieux du Champsaur son terrain d’exercice.

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    Aujourd’hui sa chapelle des Pétètes est devenu un must touristique du département des Hautes-Alpes.

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    Les reproductions abondent de ces « poupées » (terme consacré par la tradition locale) nichées par Jacques Pascal vers 1740 dans la façade de Saint-Grégoire dans le hameau de l’Aubérie, sur la commune de Bénévent-et-Charbillac, récemment absorbée par Saint-Bonnet-en-Champsaur.

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    Poupées est sans doute un faible mot pour ces curieuses faces de lune et ces figurines hiératiques et sommaires, dépourvues de bras mais non d’expressivité muette et intense.

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    Il est difficile de savoir si Pascal réalisa ses sculptures pour décorer la chapelle ou s’il édifia celle-ci pour servir d’écrin à sa production lapidaire.

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    Mais si l’édifice n’est pas sans parenté avec d’anciennes maisons de la montagne (large voûte surplombant une porte cloutée), les sculptures qui ne représentent que vaguement la Vierge et les saints ont trop d’originalité pour ne pas afficher leur indépendance.

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    82784651_o.jpg82784662_o.jpg

    logo aesculape.jpgDans un article paru en 1939 dans la revue Aesculape, Jacques Vié et Robert Waitz ne peuvent s’empêcher de risquer, à leur propos, des rapprochements avec des œuvres d’un primitivisme véritable : sculptures bretonnes du XVIe siècle, sculptures de l’Amérique précolombienne.

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     On notera qu’alors la rumeur populaire attribuait à « un berger du pays » la paternité de l’œuvre de Jacques Pascal. On notera aussi que Vié et Waitz font état de la découverte par leurs soins d’une « autre pierre gravée de la même facture » (datée de 1746) à Saint-Bonnet « au bord d’un chemin non loin du pont du Drac ».pierre gravée.jpg

     

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  • Un troglodydacte arménien

    Honneurs aux bâtisseurs sauvages d’accord ! Mais en ces temps caniculaires, où l’on s’enfouirait bien pour trouver la fraîcheur, célébrons aussi les « troglodydactes ».

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    Le prodigieux Levon Gharibian, par exemple, dont une dépêche de l’AFP a révélé récemment l’existence.

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    23 ans durant cet Arménien opiniâtre a consacré sa vie à la réalisation d’un ambitieux labyrinthe sous sa maison d’Arinj.

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    Il semble que, dans cette petite ville située près d’Erevan, cette création extraordinaire soit devenue une attraction touristique.

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    Levon's Divine Underground

    C’est sa veuve Tossia qui organise les visites.

    l'internationale intersticielle,Levon Gharibian,Arménie,

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    Levon s’est plu à se représenter sur le mur de son jardin en sa compagnie.

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    Mais il a conçu aussi pour son réseau de galeries toute une décoration qui n’est pas sans rapport avec les traditions locales des édifices religieux.

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  • Æsculape c’est Byzance

    Un curieux dessin polygonal. C’est le titre d’un article paru en décembre 1911 dans le n° 12 d’Æsculape, une revue traitant des sciences, des lettres et des arts dans leurs rapports avec la médecine.

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    Article illustré par un portrait de « genre byzantin » qui a tout de suite rappelé quelque chose à notre camarade Ani. En août 2010 et juin 2013, sur son blogue Animula Vagula, elle avait posté de fantômatiques images visiblement de la même main. Elles étaient dues à une certaine Marie Egoroff.

    Le dessin d’Æsculape émane « d’une dame n’ayant étudié ni le dessin ni la peinture » dont les initiales sont : C.-B. d. l. T. S’agit-il d’un pseudonyme adopté tardivement pour protéger l’anonymat de l’auteur ? Voilà le mystère qui s’épaissit, ce qui n’est pas fait pour nous déplaire. Le texte dont l’artiste a accompagné son dessin nous en apprend pas mal sur ce créateur habile à naviguer entre divers courants.

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    C.-B. d. l. T. réfute l’opinion selon laquelle ses dessins auraient été obtenus par la suggestion hypnotique. Plusieurs de ses portraits ont certes été réalisés en présence de psychologues dont Théodore Flournoy, célèbre pour ses travaux avec le medium-artiste Helen Smith (1961-1929). Mais « ces messieurs se sont abstenus de toute intervention ».

    Ne subissant aucune modification de son état de conscience quand elle dessine Madame C.-B. d. l. T. (ou plus vraisemblablement Marie Egoroff) écarte toute idée d’auto-suggestion. Il suffit simplement que sa main « munie d’un crayon (…) se pose sur le papier pour qu’aussitôt » son bras « se mette en mouvement et traces des hachures, des traits d’une finesse extrême, comme burinés (…) ». Il ne faut cependant pas, selon elle, « classer cette médiumnité parmi les cas pathologiques ». La dessinatrice souligne son extraordinaire bonne santé, parle de son « caractère très modéré ». Elle n’est, dit-elle, « ni enthousiaste, ni imaginative » et son humeur « est parfaitement égale ».

    Etrange insistance qui révèle peut-être qu’entre 1894-1898 (dates des œuvres signalées par Animula) et 1911 (date de l’article d’Æsculape) Marie Egoroff a ressenti les inconvénients d’une popularité paranormale. Tout au plus admet-elle que son « don » lui semble « miraculeux ». Elle nous éclaire aussi sur les conditions d’exécution de ses portraits : « en moins d’une heure, souvent même sans regarder pendant plusieurs minutes ce que je fais, sans savoir en tous cas ce que cela va donner jusqu’à la fin ». Fin qui coïncide avec le remplissage total de la feuille.

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  • Vieux chameaux

    Le désert appelle le chameau comme la saucisse la moutarde. Qu’est-ce qu’un chameau ? Pas seulement une personne vache. « Un chameau c’est un cheval dessiné par une commission d’experts » dit Francis Blanche. Un chameau ou un dromadaire : on n’est pas à une bosse près! Des camélidés en tous cas.

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    On vient d’en découvrir un petit troupeau pas loin de Sakaka sur trois éperons rocheux (trois bosses en somme) dans une zone quasiment inexplorée de la province d’Al-jawf. 

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    Du genre monumental les chameaux, sculptés en haut et bas-reliefs. On soupçonne les Nabatéens, un peuple ancien de l’est du Jourdain d’avoir fait le coup.

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    Il fallait pourtant être un peu à l’ouest pour aller faire du land art dans ce coin sans flotte de l’Arabie saoudite à l’interstice de l’antiquité et du premier millénaire de notre ère.

     

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  • Les mosaïques exaltées de Louis Terrasse

    Encore Vialatte et Bonaparte toujours. Ou comment l’Égypte ramène à l’Auvergne. Le Dilettante, en 2002, a publié Au coin du désert, un recueil de textes du grand Alexandre écrits à l’ombre des Pyramides en 1938. Lecture idéale en ces temps où l’on passe sans transition de la froidure neigeuse à la douceur printanière.

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    « En passant dans la rue Jacob » écrit Vialatte, « il m’a semblé sentir soudain souffler le vent d’Aboukir. J’avais vu, derrière une vitre, Bonaparte qui me regardait de ses yeux qui nous suivent encore ».

    Et notre chroniqueur d’énumérer les lieux où l’image du conquérant corse se retrouve. « En culotte blanche dans les petits cafés d’Alexandrie, sur des calendriers-réclames », « au musée de l’Orangerie dans le pêle-mêle glauque et mordoré des antiquailles et des estampes ». L’auteur évoque les Mayençais qui « fleurissent la tombe de ses grognards ».

    Et puis il nous livre soudain un de ses morceaux de curiosité dont il a le secret : « le garde champêtre de Viverols, dans le Puy-de-Dôme, l’immortalise en mosaïques exaltées faites d’ivoire, d’écaille d’huître et de boutons de culotte ! ». On aimerait voir ça.

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    Petrus Batselier, dans un article paru en 1997 dans le Dossier Vialatte de L’Âge d’homme (AV le temps d’un pique nique avec Père Ubu et trois satrapes) nous en apprend davantage. Le garde champêtre s’appelait Terrasse. Il exerça divers métiers dont celui de menuisier et de restaurateur.

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    A 11 ans, « Le début de sa carrière artistique consista en une reproduction en ruche de pin, inspirée par l’image du cahier d’école de marque Labor improbus.

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    Il réalisa ensuite ses rêves –Passage des Alpes, Napoléon devant Ratisbonne, la Bataille des Pyramides etc.– en écaille d’huître et en boule de billard ».

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    Créateur d’un Musée des Merveilles dans sa salle à manger, Terrasse est aussi l’auteur d’un objet poétique par l’adaptation d’un guidon de bicyclette à une faux.

    Et c’est ainsi…

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  • Marcio : un sage à la plage

    Brésilien. Le roi du château de sable est brésilien. Il s’appelle Marcio. Marcio Mizael Matolias et il œuvre sur la plage à Rio de Janeiro. Une construction belle comme un camion et haute de même.

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    Photo AFP

    Des performances de cette sorte sont remarquables mais pas si rares. On en a soupé des concours de plage et du perfectionnisme de sable monté en graine. Mais là c’est différent. Parce que Marcio vit dans son château. Il s’y est aménagé une chambrette-bibliothèque, lui qui aime à promouvoir la lecture.

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    Photo AFP

    InterstiCielle architecture éphémère s’il en est ! D’autant plus éphémère que la vague touristique vient naturellement lécher son rivage jusqu’à mettre en question son « work in progress » toujours renouvelé.

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    La nouvelle de son existence nous parvient d’ailleurs au gré d’un processus de médiatisation qui bientôt aura raison de cet espace de vraie liberté.

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    Photo AFP

    Heureusement Marcio a de la ressource. Il est conscient que cette marée de popularité finira par l’atteindre. Il songe à rebondir, caresse son chien, projette de monter un atelier où s’adonner à d’autres formes d’art. C’est un sage.

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  • Poubelles rebelles à Tréboul

    Une bonne nouvelle pour commencer l’année.

    On a relâché le graffitiste de Douarnenez qui se livrait en catimini à l’inventaire général des titres de films sur les poubelles de sa ville.

    l'internationale intersticielle,

    Affaire à suivre cependant car la restauration à l’identique de ces pièces maîtresses du mobilier urbain coûterait paraît-il une fortune aux contribuables finistériens. Souhaitons que les tribunaux fassent preuve en cette affaire d’autant de compréhension et de célérité que la maréchaussée.

    l'internationale intersticielle,

    Celle-ci n’ayant pas mis plus de 4 mois pour appréhender en douceur le présumé cinéphile après que ses agissements iconoclastes (mais artistiques) aient été signalés sur un blogue amateur de pied dans le plat.

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  • Art rebelle : do it !

    La rébellion se cultive. Non comme les salades dont on nous gave à coups de pesticides médiatiques. Mais par la seule force bio du bon vieux DIY. Rebel Rebel, à première vue ça ne nous rajeunit pas mais ça fait salon aujourd’hui.

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    Comme à Marseille où le FRAC PACA s’est paré en octobre dernier du bandeau de pirate cher à David Bowie.

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    « Rebel rebel, you’ve torn your dress » : facile à dire mais pas facile à faire dans un défilé d’art contemporain pur laine !

    Une publication réalisée pour l’occasion par Seitoung tire cependant son épingle de ce jeu officiel. 100 % Do It Yourself, ce recueil d’un artiste au service du fanzinart depuis 1984, rassemble 52 manifestes pour un art rebelle.

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    Inspirés (entre autres) par les idées de Istvan Kantor, Vihls, Antony Squizzato, Laura Morsch-Kihn et Orlan (en figure de proue), ces textes percutants et drôles, indisciplinés et informés semblent rédigés par Melayne Seitoung lui-même.

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    A l’exception bien sûr de l’à propos de l’Internationale interstiCielle qui, en invité reconnaissant, joue son rôle de cheveu sur une soupe déjà riche en ingrédients.

    Tout cela, diront certains, n’est pas limpide mais il ne manquerait plus qu’on s’y retrouve ! Un peu d’obscurité ne nuit pas au message. Il suffit de se ménager une entrée dans le corpus rebelle.

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    Celle du Zinewallisme par exemple montre combien Seitoung, dans ses activités éditoriales, a conscience de se mouvoir sur un fil interstiCiel : « Le monde de l’art veut mettre les fanzines dans des musées, des collections, derrière des vitrines et celui d’Internet les veut numérisés et partagés par le plus grand nombre. Aucune de ces deux attitudes n’incarne la radicalité des objets eux-mêmes. Ce paradoxe est dépassé par le zinewall ».

    Happy few, n’attendez donc pas pour accrocher les 52 manifestes sur votre mur de zines ! Suivant les lois du genre, le tirage est très restreint. Ce livre, marqué au coin d’un ludisme élégant mais pensé, nous épargne l’autodérision élitiste qui caractérise les pesanteurs pataphysiques.

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    On y frôle cependant (sans jamais tomber dans l’un ou l’autre) l’oupeimpo, fluxus, l’actionnisme viennois, l’institut du vandalisme et le jeu du piment. Le lecteur peut ainsi picorer à sa guise :

    le toyisme

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    le sloganisme

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    l’art savon, le sismo-art

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    le kid-art 

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    le post-Art Brut singulier 

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    le ratisme ou bad art.

    cecilia jimenez.jpgToutes choses basées sur la saturation graphique de l’espace, l’agitation, le détournement des codes et traditions. Sous l’apparence d’une anthologie de manifestes, le fanzine de Seitoung propose une typologie de pratiques artistiques contemporaines, hyper spontanées, énervées, urticantes et collectives, conscientes ou non. Plus ou moins subversives, sur une échelle de 1 à 10 petites bombes en tête de page.

    sommaire 52.JPG« De quoi devenir un artiste rebelle en moins d'un an »

    Rien moins.

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  • Enluminures provençales

    D’Augustin Gonfond (1849-1909), agriculteur provençal et miniaturiste autodidacte, on sait peu de choses. Sinon qu’il fut porté par la vague néo-gothique qui déferla sur l’Europe jusqu’à l’époque victorienne. Ce style troubadour se propagea dans les arts décoratifs avant d’être supplanté par le japonisme. Dans l’univers du livre, ce goût pour les ambiances moyenâgeuses ne concerne pas que la chose imprimée. Dans le dernier tiers du XIXe siècle, l’art médiéval de l’enluminure connaît un renouveau tel que des peintres non professionnels, animés d’une foi populaire et d’un réel talent naïf, s’emparent de ses techniques.

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    Augustin Gonfond et son épouse peints par lui-même

    On ignore comment Augustin Gonfond assimila celles-ci. Sans doute sa scolarité chez les Frères à Saint-Rémy puis au Petit séminaire d’Avignon y est-elle pour quelque chose. On pense qu’il s’inspira dans son travail d’anciennes gravures. Toujours est-il que, dans son œuvre constituée de 4 livres enluminés et de tableaux biographiques finement calligraphiés et ornés sur vélin, Gonfond, s’écartant du troupeau des simples pasticheurs des moines-copistes du XIVe siècle, fait preuve d’une originalité certaine.

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    Une publication (encore disponible) du Musée des Alpilles qui conserve et montre l’essentiel de Gonfond analyse celle-ci en détail : usage du provençal aussi bien que du français et du latin, luxuriance décorative

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    sens du quotidien (maisons, costumes)

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    représentations de lieux précis (les ruines des Antiques, la collégiale)

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    attention à la flore et à la faune…

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    Si les enluminures des livres de Gonfond semblent parfois trop tributaires du modèle des images pieuses, il excelle dans le renouvellement de la décoration marginale. Fruit de la patience et de l’habileté, le monde enluminé d’Augustin Gonfond pétille là d’une inventivité qui mêle fantaisie et tératologie.

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    C’est qu’il passe par le filtre poétique d’une conscience malheureuse. La mortalité infantile, courante à son époque, n’épargna pas la famille de l’artiste. « En neuf ans, entre 1886 et 1894, il perd ses trois filles (…) emportées l’une après l’autre par la maladie à l’âge de 6, de 5 et de 16 ans. (…) Les travaux les plus émouvants d’Augustin Gonfond sont les tableaux qu’il composa à leur mémoire : portrait, mèches de cheveux et histoire de leur vie (…). Tout en célébrant les courtes existences de ses enfants, Gonfond nous parle de lui, nous dit ses convictions profondes » (Evelyne Duret, opus cité).

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    On ne s’étonnera pas que ces croyances soient celles du conservatisme catholique à la veille de la Loi de séparation des Églises et de l’État (1905). Attaché à ce terreau des valeurs du passé, Augustin Gonfond ne peut cependant s’empêcher de loucher – fût-ce pour la brocarder – vers ce marqueur de modernité : la Tour Eiffel.

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  • Joseph Barbiero chez les Gaulois

    Joseph Barbiero vaut le détour. Le détour par Montans, près Gaillac dans le Tarn. Jusqu'au 18 septembre 2O17, l'Archéosite de ce village potier du temps des Gaulois abrite une exposition croisant les regards de l'Art et de l'Archéologie.

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    Dialogue par dessus les siècles entre des sculptures antiques et les pierres de Volvic sorties toutes vives de l'imagination et du burin de Joseph Barbiero, maçon-bricoleur au look de jardinier dont le talent artistique fut repéré et célébré dès 1983 par l'antiquaire-poète Jean Lelong.

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    Depuis 1985, date de sa première exposition à Vic-le Comte dans le Puy-de-Dôme, il n'est pas fréquent de croiser les œuvres de Barbiero. La dernière fois c'était pour nous en 2011 à Paris. Aussi cela vaut-il la peine de quitter l'A68 un moment pour découvrir les 11 pierres prêtées à Montans cet été par la famille du sage et volontaire Barbiero.

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    Elles sont accompagnées de photographies de Jean-Paul Cieutat qui se veut "passeur d'images", révélateur d’un héritage (...) venu du fin fond de l'humanité pour nous dire, à nous hommes modernes, que nous sommes tous issus d'une même matrice".

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    Cette phrase est extraite du livret-catalogue de cette exposition conçue par Fany Maury et Jean-Marc Ferrandon qui ont le mérite de mettre en évidence une résonnance esthétique dont Jean-Louis Lanoux, dans un article paru dans la revue Plein Chant (L'Itinéraire volcanique d'un Gaulois vénitien) témoignait en 1992.

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    Fort émouvante aussi une vidéo qui passe en boucle issue des archives de l'INA. Barbiero interviewé parle de ses "bricoles". Elle date de 1985. Quand le journaliste l'interroge sur la création à 85 ans, Joseph réfléchit et rectifie posément : "84 ".

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    Il disposa encore de 6 ans pour griffer, gratter, entailler, sculpter et dessiner sur des cartons de boîtes de biscottes.

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  • Cachotterie

    La fraîcheur des cachots par temps chaud. Quoi de plus enviable ? Une maison de bailli dans la Drôme provençale fera l’affaire aujourd’hui.

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    Ici on rendait et on appliquait la justice. Où ça ? A Grignan non loin d’une géante verte en robe de marquise et anglaises de petite fille : la dame Sévigné, plume au vent.

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    L’endroit abrite maintenant un atelier-musée de typographie, baptisé Colophon. Ainsi se font font font les rencontres.

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    La prison de Colophon abrite intra muros quelques rudes graffiti auxquels on ne saurait s’empêcher de tirer le portrait.

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  • Ponny soleil sauvage

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    Visages Villages : Ponny de Reillanne. Seuls ceux qui n’ont rien compris au Film InterstiCiel se sont abstenus d’aller voir le nouveau documentaire d’Agnès Varda et de JR son agile compère, photographe-colleur de rue.

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    En Provence où il fut tourné en partie, VV a fait la une des journaux.

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    Et sur le Net on trouve tout sur lui, y compris une goûteuse bande annonce pour mettre en appétit les retardataires.

    Ne pas rater cependant la dernière séance. A La Manutention d’Avignon, il passe encore en cette fin juillet 2017.

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    La chronique de la Gazette Utopia, distribuée sur la ville, se termine par des mots qui donnent envie d’excursions dans le Luberon. Ce sont ceux de Ponny, « artiste méconnu et haut en couleurs » qui fait une apparition remarquable dans le film : « Je suis né à l’ombre d’une étoile. Ma mère la lune m’a donné sa fraîcheur. Mon père le soleil, sa chaleur. Et l’univers pour y habiter».

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    Le succès du tournage à Reillane, village perché à l’écart sur la route d’Apt à Forcalquier, est loin d’avoir monté à la tête de ce personnage qui « a des muscles dans les  rides », comme JR le dit d’Agnès.

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    Photo JR

    Le moins que l’on puisse dire c’est qu’il demeure caché. A l’office du tourisme, on vend 3 cartes postales de son Capsulistan.

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    La dame au léger accent anglais, qui renseigne gentiment les curieux, a beau localiser sur un plan l’endroit où - croit-elle -réside l’homme aux assemblages colorés, on erre, une fois sur place.

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    Après le cimetière, un chemin en surplomb d’une jungle végétale mais aucun sentier pour y descendre. Pas même l’indice du passage régulier d’un homme. D’ailleurs est-ce là ? Rien n’est moins sûr.

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    h invisible.jpgOn n’aperçoit rien du domaine sans téléphone ni électricité de Ponny. Décevant ? Non. Une telle discrétion plaide pour l’authenticité de ce personnage. Elle mérite d’être respectée. Comme les bandelettes de l’homme invisible.

     

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  • Pédagogie active

    Pédagogie active.

    Salles de détention estudiantines (Studentenkarzer) dans les universités allemandes depuis le 18e siècle jusqu’à la guerre de 14.

    Y être emprisonnés était devenu un point d’honneur pour les étudiants turbulents et rebelles.

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    Greifswald

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    Freiburg

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    Iéna

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    Heidelberg

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    Malburg

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    Tübingen

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    Nürnberg

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    Göttingen

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    Leipzig

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    Kiel

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  • L’enraciné Abbé Aymon

    Célébrons l’Abbé Aymon. Les merveilles de la nature à l’ombre de la croix : une telle promesse a de quoi nourrir la perplexité de l’automobiliste qui traverse un village de l’Indre en 1994. A fortiori si la croix est rouge. Et qu’elle se détache sur une façade blanche comme la blouse d’une infirmière. A fortiori si une pancarte au pied de la porte de la boutique fait état de chefs d’œuvre de racines à voir et à revoir.

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    Fût-on athée comme une souche, rancunier comme une mule du pape à l’égard des membres du clergé, on ne pouvait que plaider pour cette paroisse.

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    La paroisse rurale de ces faiseurs de miracles -ensoutanés ou non- qui ont de l’art au bout des doigts. On pénétrait au centre de celle-ci qui mêlait si facilement bréviaire et De natura rerum par trois degrés de pierre alors salpêtrées.

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    Curieux du zoo bizarre qu’on apercevait derrière des vitres plus ou moins translucides. 250 animaux et personnages se pressaient là, on voulait bien le croire.

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    Mais la porte était fermée. Il fallait attendre -innocente initiation- le concours de Georges, un voisin qui veillait sur le lieu. Il ne tardait pas.

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    Il y a 23 ans, c’est à dire 7 ans après la disparition de André Aymon (1903-1987), le souvenir de ce drôle de curé était encore vif à Thevet Saint-Julien, commune du centre de la France. Inventeur, bricoleur, sculpteur, lève-tôt, évadé pendant la guerre…

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    Georges se faisait l’écho des anecdotes de ses concitoyens. C’est que l’Abbé Aymon avait tout ce qu’il fallait pour entrer dans leur modeste Légende dorée. Avec son nom de chanson de geste. Avec son église dont il avait 45 ans durant ouvragé les portes, décoré les piliers et les balustrades. Dans un style d’imagier réservé dans nos campagnes à des travaux de moindre ampleur (boîtes, cannes, coffres etc.).

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    Fils de menuisier, Aymon était tombé dans le bénitier des travaux d’art à 9 ans. « J’ai volé une planche de l’atelier pour la sculpter et je lui ai fait un cadre avec une branche d’églantine » confiait-il à l’un de ces journalistes dont il n’aimait guère qu’ils viennent l’embêter « pour mettre des articles sur les journaux ».

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    Sagement André Aymon faisait la part du feu. Si, malgré son originalité, son église témoignait de son adaptation sociale, son centre paroissial pactisait avec des forces radicalement individuelles.

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    Puisant ses matériaux au bord de L’Igneraie, la petite rivière qui baigne une dizaine de localités de la région, il y discernait des formes qu’il aidait à naître par des interventions plus ou moins légères.

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    Avec une sorte d’intuition hallucinatoire qui n’est pas sans faire penser aux Légendes rustiques récoltées dans le Berry par Maurice Sand.

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    De ce point de vue, la scénographie sauvage privilégiée par l’abbé dans son centre paroissial (de nos jours devenu musée), avec son apparence de vrac métonymique, ménageait à l’inconscient des voies d’accès.

    l'internationale intersticielle,andré aymon,thevet saint-julien,racines

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