Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

michel foucault

  • Sables mouvants

    Allez savoir ce qui, dans la boîte d’un bouquiniste ou sur les rayons d’une bibliothèque de hasard, nous fait choisir tel livre de poche plutôt qu’un autre ? Sans se soucier que l’écrivain ainsi élu soit déjà dans ce purgatoire où le mouvement versatile des temps et des choses pousse les talents.

    Hervé Guibert, par exemple, dont un petit roman dédié en 1985 « à l’ami mort » (Michel Foucault) m’est tombé entre les mains sans que je sache quel profit interstiCiel j’allais en tirer.

    couv aveugles.jpg

    Ce n’est pas la couverture réalisée d’après un académique tableau d’Evariste Vital Luminais, revu et corrigé par je ne sais quel Ben ou Fromanger, qui fut la cause de cette rencontre.

    l'internationale intersticielle,hervé guibert,michel foucault

    Plutôt le titre laconique (Des aveugles) s’associa-t-il trop bien dans mon esprit à cet « air sérieux, halluciné, presque somnambulique » (Edmund White) qui flotte encore dans le regard de Guibert maintenant qu’il est dissocié de cette image angélique et satanique de bogosse qui lui collait au visage.

    Guibert-regard.jpg

    « A l’origine de cette fiction - précise l’avant-propos du livre – il y a l’expérience menée par Hervé Guibert à l’Institut National des Jeunes Aveugles, où il fit d’abord un reportage puis devint lecteur bénévole. Au sein d’une institution que l’on dirait sortie de Surveiller et punir, Guibert imagine comment les enfants aveugles s’évadent de ces hauts murs par la violence de leurs fantasmes et l’exacerbation de leurs sensations » (Frédéric Gaussen).

    Et cela nous mène, dans un bac à sable où Josette et Robert, les deux principaux héros de cette chronique de la cécité, expérimentent de nouvelles pratiques de communication où l’art et l’érotisme se mêlent si intimement qu’elles relèguent loin derrière elles bien des dérisoires tentatives avant-gardistes de notre contemporanéité : « chacun, l’un après l’autre, croyait dessiner quelque chose de son corps, le faire toucher à l’autre dans le sable, comme si cette première caresse loin du corps donnait ensuite le droit d’y avoir accès, sous le vêtement ou à travers. Des motifs simples furent dessinés. Puis au cours des ans, l’exploration mutuelle prenant des formes différentes, des orgies abstraites comme des géométries apparurent et disparurent dans le sable ».

    l'internationale intersticielle,hervé guibert,michel foucault,énervés de jumièges,evariste vital luminais

    Lien permanent 0 commentaire Imprimer
  • La vie parallèle d’Henry Legrand

    Appliqué à la vie, le parallélisme a tout pour plaire. Surtout quand il se présente, non sous le masque austère d’un vieux philosophe romain mais sous la plume du regretté Michel Foucault : « Ce serait comme l’envers de Plutarque : des vies à ce point parallèles que nul ne peut plus les rejoindre ». J’emprunte cette phrase évocatrice à la quatrième de couverture d’un trapu petit livre bleu ciel publié en 1979 par Gallimard : Le Cercle amoureux d’Henry Legrand.

    couv le cercle.jpg4e de couv le cercle.jpg

    Foucault présentait là une collection : Les Vies parallèles qui n’eut, après la guerre, que deux titres. C’est dommage. Celui-ci, qui traite de l’étrange manuscrit-fleuve d’un architecte cryptographe du milieu du 19e siècle, augurait bien. Mais l’écriture chiffrée n’a sans doute jamais été rentable pour un éditeur.

    le cercle page cryptée.jpg

    Aussi s’y mirent-ils à deux pour offrir au public des années disco un aperçu sur les 39 volumes de cet extraordinaire opus (agrémenté de nombreux dessins à la plume) conservé à la Bibliothèque nationale.

    le cercle page illustrée.jpeg

    Parallèlement -si j’ose dire- à l’édition Gallimard, Christian Bourgois publiait, la même année, Adèle, Adèle, Adèle, en référence à la mystérieuse Adèle de M., présidente de la société secrète dont Legrand était le seul membre masculin. Soit dit sans grivoise allusion bien qu’il fût aussi l’amant des neuf femmes, aristocrates et bisexuelles, composant avec lui le Cercle.

    l'internationale intersticielle,plutarque,michel foucault,henry-alexandre legrand,cryptographie,pierre louÿs,charles monselet

    L’histoire on le voit avait de quoi, intéresser Pierre Louÿs et il s’y intéressa. D’abord en faisant l’acquisition en 1907 de cet ouvrage à caractère partiellement érotique. Ensuite en découvrant le chiffre permettant d’en comprendre le contenu.

    le cercle intérieur 1.jpgAussi est-ce Paul-Ursin Dumont, un spécialiste de Pierre Louÿs, qui avec le concours de son fils Jean-Paul Dumont, professeur d’ethnologie, transcrivirent et documentèrent les extraits des manuscrits d’Henry Legrand contenant ses mémoires et relatant sa vie secrète au sein d’une cour d’amour en parfait contraste avec la société bourgeoise à laquelle il appartenait.

    le cercle intérieur 2.jpgLa collection de manuscrits de Legrand de Beauvais (c’est ainsi qu’on le désigne souvent), seraient d’une grande perfection. Selon Charles Monselet (1825-1888) ils représentent le travail d’une dizaine d’années : « Cela ressemble (…) à la calligraphie orientale. Beaucoup de pages ont des encadrements (…) d’une finesse prodigieuse : fleurs, animaux, blasons, anges, paysages, ruines, coraux etc. ». Avec son sens de la formule, l’auteur des Oubliés et Dédaignés qualifie l’œuvre de Legrand : « un des monuments les plus étranges de la manie humaine ».

    l'internationale intersticielle,plutarque,michel foucault,henry-alexandre legrand,cryptographie,pierre louÿs,charles monselet

    Lien permanent Catégories : Hommes non illustres, Utopies 0 commentaire Imprimer