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Les Petites feuilles de Cingria

« Nous avons le plaisir d’annoncer la très prochaine causerie de notre ami le Dr Ferdière, dir. de l’Asile de Rodez, sur un sujet qui nous touche de près : Nous sommes tous fous. »

Annonce parue le 27 avril 1942 dans le numéro 4 des Petites feuilles, revue minuscule et éphémère en grande partie rédigée par l’érudit cycliste et écrivain vagabond Charles-Albert Cingria (1883-1954), un des plus novateurs auteurs de la Suisse romande et de la langue française, ami du peintre Jean Dubuffet qui fit de lui des portraits conformes à sa nature insaisissable.

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Nature qui transparait dans la Lettre à un jeune homme publiée dans les Œuvres complètes de l’écrivain suisse (tome XI) : « Je ne suis pas un nom : il n’y a que la vie qui m’intéresse – les maisons, les arbres, les chats, les rues, les visages, les jambes etc. (…) Et puis je n’aime pas qu’on m’aperçoive : j’aime filer anonyme et invisible, et puis m’enfermer chez moi et me passionner (…) sur des points d’histoire (…) ou de science sur lesquels je n’ai rien à déclarer hormis l’emploi que j’en fais dans une rédaction qu’on m’arrache (…) ».

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Un tel homme était fait pour une telle revue d’un si subtil décalage historique qu’on la dirait en apesanteur. Fondées avec le concours de Géa Augsbourg et de Paul Budry, les Petites feuilles détonnent dans le climat lourd de la guerre à laquelle elles semblent tourner volontairement le dos.

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« Elles n’étaient l’organe d’aucune autre collectivité que celle des amis habitués de l’Auberge de l’Onde, à Saint-Saphorin et présentaient, illustrées, des nouvelles, de la critique littéraire, artistique et musicale, des horoscopes, des annonces, bref, un tas de choses. ».

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D’un format et d’une allure modeste, ces Petites feuilles ne comportèrent que 5 numéros (entre novembre 1941 et octobre 1942) privilégiant en apparence le petit bout de la lorgnette. « Pas de politicaille débilitante » proclame l’éditorial inaugural, « En aucune occasion surtout le genre petit saint ».

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Cela n’empêche pas, au printemps 1942 (c’est à dire avant la Rafle du Vel d’Hiv) cette précision d’importance sous le titre Pas de question juive : « Il n’y a pas plus de question juive que de question chrétienne, n’est-ce pas frères chrétiens ? Il n’y a question que de la crapule. Nous pourrons donc ouvrir la question juive le jour où la dernière crapule dite chrétienne aura été collée au poteau ».

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Lien permanent Catégories : Fragments, Hommes non illustres, Les mots pour le dire 9 commentaires Imprimer

Commentaires

  • ...me plaît bien cet homme-là.
    Sa nièce, Hélène, écrivain et correspondante de presse culturelle, vivait à Villeneuve-lez-Avignon et est décédée à-n-Avignon en 1983.
    https://www.notrehistoire.ch/medias/40343
    À la fin des années 70 "L'Air d'Avignon", revue à laquelle je collaborais, l'avait publiée.

  • C'est quoi cet Air d'Avignon?
    J'espère qu'il n'est pas irrespirable avec les lacrymos puisque les manifs sont reléguées dans vos banlieues "sauvages" (private joke)

  • Quatre numéros dans l'année (comme les saisons), un rédacteur en chef de choc (celui de l'antifadas.hautetfort.com), des dossiers, des rubriques, une BD... avant la création d'Ecosud (mensuel d'informations économiques Rhône-Méditerranée libre et indépendant). Un pan de ma vie professionnelle.
    Mangés tous les deux par la publicité chacun à sa manière.
    Mais ça, c'était avant l'internet.
    o.O

  • Pour revenir à nos moutons suisses, il faut souligner que l'article de "notre histoire" sur Hélène Guerre-Cingria est repris des "Petites feuilles", organe de l'Association des Amis de CAC (n°30, Noël 2005).

  • La révérence littéraire reste de la révérence. Soit dit sans vous froisser.
    Un écrivain comme Cingria n'en a pas besoin. D'ailleurs il ne la cherche pas.
    C'est pourquoi on l'aime.
    Acronyme ou pas, prônons ensemble son "mauvais exemple"

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