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les naufragéscorinne simon

  • Dans le noir à perte de vue

    A la brocante j’ai hésité à l’acheter. La couverture était si déprimante. Une odeur de misère collée au cliché sans concession de Corinne Simon.

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    Mais Les Naufragés est un livre estampillé Terre Humaine. Un titre de cette Collection dirigée par Jean Malaurie ça ne se refuse pas. Ni Soleil hopi, ni Rois de Thulé cependant. La rage, la nausée, la lourde obscénité, le puits d’angoisse. Tout le monde déteste car tout le monde est interpellé. La puanteur humaine qui monte par bouffées chaudes. Parfum de métro, de chiotte, de dortoir.

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    La réalité émane de ces pages de Patrick Declerck. Lecture par petits bouts. Non seulement parce que le témoignage de cet ethnologue-psychanalyste sur son expérience de consultant au Centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre est éprouvante mais parce qu’on se reprocherait presque d’être captivé par ce texte bien écrit.

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    Puis, au milieu de ce journal de terrain avec les clochards de Paris, cette perle baroque : un chapitre qui relate la trajectoire d’un certain Marc P., victime d’un grave accident de vélomoteur à 19 ans, témoin de l’assassinat de son père par sa mère dans son enfance. Alcoolique, bagarreur, accro au couteau, aux calibres.

    Auteur d’une production littéraire et artistique aussi. « (…) Ce qu’il écrit, il le jette. Ce qu’il peint il le brûle ». Patrick Declerck a vu deux de ses tableaux : « (…) cris muets de cadavres dans la nuit, ils n’étaient que psychose et désastre ».

    Subsistent en revanche 4 manuscrits sauvés par une infirmière et dont Declerck publie 7 importants extraits.

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    Dans le dernier de ceux-ci, les mots, « confinent par instants à l’étrange beauté des derniers textes de Beckett ». Comment ne pas être ému d’y lire ceci : « Le noir, toujours le noir à perte de vue, subitement j’entendis au fond de moi-même un long et pénible sifflement continu. (…) Puis d’un coup, avec étonnement, je ressentis de même une espèce de pression (…) comme atmosphérique (…), une certaine unité de pression étouffante et bienfaisante (…). Et je ne sais d’où provient cette métastase, en mon interstice qui, lui, se situerait dans mon hémisphère cérébral (…). C’est comme cela que je l’ai appelé interstice car cela veut dire réellement petit espace vide, oui vide entre les parties d’un tout, et ce tout en question est le mien. »

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    Lien permanent Catégories : Hommes non illustres, Les mots pour le dire 1 commentaire Imprimer