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  • Chemin du veilleur solitaire

    Solitaire en son jardin, il tourne le dos à la route qui est plutôt chemin menant à un mas. C’est un petit personnage fièrot, cambrant la taille et les mains sur les hanches.

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    Une de ces créatures en ciment qu’affectionnent les sculpteurs de campagne. Manches relevées. Pas jeune : avec des restes de polychromie au dos. A vue de nez, des années soixante du siècle dernier.

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    Figure tutélaire qui veille sur sa maison -aujourd’hui transformée en Entreprise- avec on ne sait quel orgueil du travail bien fait dans la posture. Grand comme un enfant de 10 ans.

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    Quelques vestiges adjacents, certains indices trouvés aux alentours, permettent de dire que cette œuvre rurale faisait partie d’un modeste groupe comprenant aussi un âne et sa charrette et au moins deux maisons miniatures autour d’un puits.

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    D’autres investigations attestent de la présence d’une arène, d’un singe, d’un joueur de clairon, d’une Blanche Neige avec ses nains sur ce parterre.

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    Il n’en reste presque rien même si ces sujets étaient, semble-t-il, encore visibles (quoique noyés dans la végétation) il y a un an ou deux. Ce menu fretin sculptural, dégradé par le temps, a dû faire place à des activités moins bucoliques.

    Reste le petit veilleur qui a eu la chance d’échapper aux implacables recensements des créations de plein air menées par des traqueurs de chimères peu respectueux de la ressource.

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    Il témoigne de l’art serein d’un paysan d’autrefois dont il pourrait être un autoportrait.

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    Laissons à sa vigilance cette statue et gardons nous de la localiser trop précisément. Il suffit de savoir ici qu’elle niche au sud-est de la France dans le plus poétique anonymat

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  • M. R. et M. R. : duo de poètes disparus

    Maurice Remontrant appartient au cortège des poètes trop tôt disparus dans des circonstances dramatiques. Sous les assauts conjugués d’une pleurésie et du découragement, sa jeune vie s’est achevée à l’hôpital psychiatrique de Cahors en 1965. Il avait 21 ans et il serait aujourd’hui totalement oublié si un interne de cet établissement, le docteur Larchet n’avait pu sauver sa mémoire. Passionné par les écrits de malades mentaux, Larchet exhuma des manuscrits de Remontrant de la bibliothèque de l’hôpital. Pour les mettre à la disposition des chercheurs, il les présenta à la presse le 20 novembre 1976.

    Aucune édition n’en fut faite car on s’aperçut vite qu’ils avaient été déjà publiés sous un autre nom. Celui du romancier Marc Ronceraille (1941-1973), « poète maudit » et sportif de haut niveau. Un accident de montagne mit fin à la carrière de ce play boy des lettres des années 70, si prématurément qu’on peut douter de nos jours de son existence. Ronceraille n’en figure pas moins, aux côtés de Roland Barthes, Boris Pasternak ou Virginia Woolf dans la fameuse Collection Ecrivains de toujours, cette Pléiade du Seuil.

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    C’est dans ce volume –le centième de la Collection– publié en 1978 que l’on trouve le peu de renseignements dont on dispose sur Maurice Remontrant. Sous la plume de Philippe Morand qui nous campe un garçon exigeant et inquiet, nerveux et capable d’« éclairs extraordinaires ». Plutôt petit, mince, « avec des cheveux très noirs, mal peignés, une grande mèche lui tombant sur les yeux, des yeux très vifs, presque inquiétants (…). On l’aperçoit sur une photo en compagnie de Marc.

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    Maurice Remontrant était « l’aiguillon » de l’école poétique de Saint-Jean d’Angély groupée autour d’une revue artisanale d’avant-garde Le Centripète. Sous le pseudonyme de Lésaimère (allusion à leurs initiales communes), les deux poètes y donnèrent aussi des textes à quatre mains.

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    Cette conduite littéraire fusionnelle fut-elle fatale à Maurice ? Autorisa-t-elle Marc à s’attribuer la paternité de L’Architaupe, Sol mémorable, Runes et L’Imagerie mécanique du professeur Batave qui forment l’essentiel de l’œuvre ?

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    Toujours est-il que le destin de Remontant fut scellé. Souffrant de névralgies, dépressif après la mort de ses parents, il fut contraint d’entrer à l’asile « à la suite d’un esclandre » dont on ignore la nature. Tenter de l’imaginer nous entraînerait dans la légende, c’est-à-dire dans la supercherie.

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  • Crise d’aquarelle!

    Un peintre qui refait sans cesse le même tableau a de quoi piquer la curiosité d’un lecteur quand il le rencontre dans un livre. Surtout si le tableau représente simplement une souche d’arbre au milieu d’une clairière avec un oiseau perché dessus. Le lieu d’exposition de cette œuvre unique dont seules les couleurs varient avec les saisons n’est pas moins banal. Non une galerie ou un musée d’art contemporain mais un grand magasin de Montréal dans les années soixante.

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    Difficile de croire que Michel Tremblay, né sur le Plateau, n’exploite pas ses souvenirs d’enfance dans Le Peintre d’aquarelles.

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    Même si le héros de ce roman qui a l’âge de l’auteur et qui produit comme lui de désarmantes images minimalistes ajoute sa dimension photosensible à l’évocation du peintre d’un établissements aujourd’hui disparu.

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    « [Il] peignait sur place, de neuf à cinq, six jours par semaine. (…) Ses tableaux se vendaient comme des petits pains chauds. (…) On l’avait installé à droite de l’entrée dans une espèce de petit atelier. (…) Il installait les œuvres à vendre sur des chevalets, il était donc entouré de dizaines de copies de celle qu’il était en train de faire. »

    Marcel, le narrateur, surnommé Pigeon, est fasciné. Quand il va au magasin avec sa mère ou avec sa tante, il les tire «invariablement vers l’atelier du vieux monsieur à la pipe »Sa mère trouve que le peintre est fou. Sa tante déclare parfois qu’elle accrocherait bien trois de ses tableaux chez eux : « J’trouve que ça nous ressemble : toujours la même chose, juste des détails qui changent. ».

    C’est cette tante Nana qui portera assistance au petit Marcel lors de cette épisode qui fait de la quarante et unième page du roman de Tremblay publié chez Actes Sud, un morceau de bravoure.

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    « Une fois j’étais resté trop longtemps devant les tableaux », raconte Marcel, « et, est-ce la répétition de la même image qui avait produit en moi un effet de stroboscope, je ne l’ai jamais su, j’avais fait une crise d’épilepsie en plein magasin L. N. (Louis-Napoléon) Messier ».

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