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  • Arène et sirène

    On a tort de croire que tous les villages de Provence n’ont que des coins rendus croquignolets par le tourisme de masse. Bien sûr il y a beaucoup de marchés paysans où l’on vend la pacotille si joliment fabriquée en Chine. Beaucoup de bars des arènes où l’Europe burn-aoûtée se gargarise au pastis, le ventre à l’aise dans son Marcel Pagnol pour les nuls.

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    Mais il reste aussi des rues trop perchées pour ne pas être désertées par les tongs et les pantacourts.

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    Des maisons en ruines aux jardins envahis par les ronces.

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    Parfois des pompes à essence rouge et des fantômes de clapiers bleus.

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    Et puis des loups en ciment encore assez féroces.

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    Et des sirènes les bras chargés de conques qui ressemblent à des jambons comme deux gouttes d’eau.

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  • Ernst Herbeck, Der Mannmensch

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    navratil.jpgAu Gugging, à ses chers schizos Léo Navratil dispensait de temps à autres une incitation à la création.

    herbeck portrait.jpgPour Ernst Herbeck qui se sentait comme un corps étranger dans la société et dont les rares paroles étaient, selon lui, « téléguidées » par une hypnotiseuse, le psychiatre un jour propose (avec un bristol de la taille d’une carte postale) ce thème : La mort.

    Ernst alors écrit :

    La mort un jour s’est immiscée.

    et aux morts a volé la vie.

    ainsi la mort comme alors s’est effacée.

    et aux morts offrait à nouveau

                                                        la vie.

    La version originale figure dans les 100 Poèmes / Gedichte, un petit livre rouge publié chez Harpo & en 2002

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    Der Tod kam einst einhergeschlichen.

    und raubte den Toten das Leben.

    so ist der Tod wie einst verblichen.

    und schenkte den Toten wieder

                                                      das Leben.

    Pour transposer en français les formes linguistiques originales dont Herbeck usait dans ses écrits, il n’a pas fallu moins de 5 traducteurs : Eric Dortu, Sabine Günther, Pierre Mréjen, Hendrik Sturm, Bénedicte Vilgrain. Cela valait la peine. On le sent bien. Surtout les jours où, comme l’écrit Ernst Herbeck dans un autre poème :

    La révolution est finie

    le temps est passé,

    et le fusil maudit.

    pourtant la GUERre    va

                                          son train.

    « Doch der KRIEg    geht weiter » C’est un halluciné lucide dont on entend la voix. Un écrivain qui, selon Navratil, « ne corrigeait pas, ne retravaillait pas ses textes, ne les conservait pas, ne choisissait pas ceux qui seraient publiés ».

    Un poète qui, à propos de la poésie, disait : « c’est seulement passager chez l’homme ».


    La particularité d’Ernst Herbeck c’est l’écrivain allemand W.G. Sebald qui a su le mieux nous la  transmettre : « Au moment de se quitter Ernst Herbeck éleva son chapeau et, debout sur la pointe des pieds, légèrement penché en avant, fit un mouvement circulaire, pour qu’au retour son chapeau regagne sa tête, le tout comme un jeu d’enfant et l’effet d’un art difficile tout à la fois ».

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    Lien permanent Catégories : Fragments, Hommes non illustres, Les mots pour le dire 0 commentaire Imprimer
  • Disparu ou mystérieux le Rebell de Boisson

    Disparus ou ... mystérieux. Autant dire interstiCiels. Avec ces points de suspension surtout. Brèche où le lézard du sens s’insinue.

    collection.JPGComment ne pas être interpellé par une collection littéraire qui porte un tel titre ? Même si elle date des années trente du siècle dernier. Même si elle compte peu de titres.

    Marcel Seheur, son éditeur, aimait les graveurs sur bois. Jean-Paul Dubray, le directeur de la collection était graveur. Jean Lébédeff, l’illustrateur de la couverture du Hugues Rebell intime, fut un des plus actifs artistes du livre de l’entre-deux guerres.

     

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    Rebell est un personnage dont on ne sait jamais qui le connait. Mieux vaut à son propos renvoyer aux sources qui ne manquent pas. Car, quand on se risque à vouloir présenter cet écrivain d’un paganisme nietzschéen porté à l’érotisme, on ignore si on ne va pas enfoncer une porte ouverte aux yeux des happy fews férus de fin de siècle.

    Marius Boisson servit de nègre à Hugues Rebell à la fin de sa vie. L’auteur de La Nichina ou des Nuits chaudes du Cap français, avait recours (selon les bonnes recettes de la littérature populaire) à ce genre de collaborateurs occasionnels. Le Rebell de Boisson n’est pas l’esthète décadent et voyageur qu’il fut dans sa jeunesse. 

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    Cet excentrique nantais qui se vêtait d’une soutane de cardinal pour écrire des romans d’une polissonnerie teinté de perversion 1900 nous apparaît plutôt comme un martyr de l’écriture alimentaire, empêtré dans ses combines avec les éditeurs. Harcelé par les créanciers, les maîtres chanteurs et la maladie. Acharné à sauver sa bibliothèque de livres précieux du désastre final.

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    Mais là n’est pas notre propos. L’ouvrage de Marius Boisson reproduit (en noir hélas) 3 aquarelles d’Hugues Rebell dont une d’une pornographie confuse et tumultueuse où se décèle une influence symboliste derrière la désinvolture de l‘exécution  assumée sans souci d’enrobage.

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    Pour la petite histoire, il faut se rappeler que Rebell faillit épouser la fille du graveur Félicien Rops. Extrait d’un manuscrit de flagellation – sujet sur lequel Rebell se pencha sous pseudonyme dans un livre de 1905 (Le Fouet à Londres) – cette image rustaude et explicite a figuré chez Christie’s dans une vente en 2014.

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    Lien permanent Catégories : Les mots pour le dire, Matières plastiques 0 commentaire Imprimer
  • Elémentaire mon cher boson *

    Bibliothèque municipale. Pas d’expo cette année malgré les vacances. Sucrée pour « raisons budgétaires ». Collectivités locales ponctionnées par l’Etat (tout pour le foot). A l’heure de la sieste on éteint les barres de leds. L’été, sans la clim, ça tient trop chaud. Petit fauteuil crapaud où s’effondrer pour lire la presse dans le blackout. Figaro ci, Inrocks là. Brexit, attentats, Tour de France, 49-3. Les Particules élémentaires oubliées sur la table. Faut-il être désœuvrée pour arriver à la page 39 !

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    Au milieu d’un pavé plutôt rasoir sur la vie du père de Bruno, l’un des ectoplasmiques protagonistes de ce déjà vieux roman de notre coqueluche littéraire du début du XXIe siècle, un passage qui porterait presque à se faire un film en attendant l’happy hour : « (…) il parlait réellement de moins en moins. Il construisait des petits autels avec des cailloux, des branchages, des carapaces, des crustacés; puis il les photographiait sous une lumière rasante »

     

    * Boson, kesako ? C'est la particule de dieu !

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  • Sables mouvants

    Allez savoir ce qui, dans la boîte d’un bouquiniste ou sur les rayons d’une bibliothèque de hasard, nous fait choisir tel livre de poche plutôt qu’un autre ? Sans se soucier que l’écrivain ainsi élu soit déjà dans ce purgatoire où le mouvement versatile des temps et des choses pousse les talents.

    Hervé Guibert, par exemple, dont un petit roman dédié en 1985 « à l’ami mort » (Michel Foucault) m’est tombé entre les mains sans que je sache quel profit interstiCiel j’allais en tirer.

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    Ce n’est pas la couverture réalisée d’après un académique tableau d’Evariste Vital Luminais, revu et corrigé par je ne sais quel Ben ou Fromanger, qui fut la cause de cette rencontre.

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    Plutôt le titre laconique (Des aveugles) s’associa-t-il trop bien dans mon esprit à cet « air sérieux, halluciné, presque somnambulique » (Edmund White) qui flotte encore dans le regard de Guibert maintenant qu’il est dissocié de cette image angélique et satanique de bogosse qui lui collait au visage.

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    « A l’origine de cette fiction - précise l’avant-propos du livre – il y a l’expérience menée par Hervé Guibert à l’Institut National des Jeunes Aveugles, où il fit d’abord un reportage puis devint lecteur bénévole. Au sein d’une institution que l’on dirait sortie de Surveiller et punir, Guibert imagine comment les enfants aveugles s’évadent de ces hauts murs par la violence de leurs fantasmes et l’exacerbation de leurs sensations » (Frédéric Gaussen).

    Et cela nous mène, dans un bac à sable où Josette et Robert, les deux principaux héros de cette chronique de la cécité, expérimentent de nouvelles pratiques de communication où l’art et l’érotisme se mêlent si intimement qu’elles relèguent loin derrière elles bien des dérisoires tentatives avant-gardistes de notre contemporanéité : « chacun, l’un après l’autre, croyait dessiner quelque chose de son corps, le faire toucher à l’autre dans le sable, comme si cette première caresse loin du corps donnait ensuite le droit d’y avoir accès, sous le vêtement ou à travers. Des motifs simples furent dessinés. Puis au cours des ans, l’exploration mutuelle prenant des formes différentes, des orgies abstraites comme des géométries apparurent et disparurent dans le sable ».

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