Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Clochards terrestres

    Une fois encore l’année commence par un encombrement de cadeaux à vendre sur la Toile. Que faire de toutes les cochonneries reçues à Noël et à la Saint-Sylvestre ? On bazarde sans complexes sur le Bon Coin-coin. L’époque invite à ça. Il est pourtant des choses qui méritent d’être gardées.

    couv parrain de cendre.jpg

    L’écrivain auvergnat Jean Anglade dans son roman Un parrain de cendre (1991) signale malicieusement un de ces présents rares offert au couple royal anglais lors de sa visite à Paris en 1938. « La capitale les reçut avec enthousiasme et les couvrit de cadeaux. Même les seize mille clochards y allèrent du leur : une terre cuite modelée par un artiste domicilié sous les ponts ; elle représentait leur corporation sous l’image d’un couple en guenilles et d’une bouteille ».

    Pas d’image hélas de ce chef d’œuvre ! Conservateurs comme le sont nos amis britanniques, on peut cependant espèrer qu’elle figure toujours dans le trésor iconographique royal. Si quelqu’un a une idée… L’entente cordiale SDF–Sa Majesté a tout pour plaire en 2019.

    Lien permanent Catégories : Fragments, Kitschounet, Souvenirs, souvenirs 0 commentaire Imprimer
  • Li (pas) ravis de la crèche

    Sans ton gilet t’es plus rien. A priori on pouvait croire que la déferlante jaune emporterait ce Noël 2018 dans son roulis festif généralisé. Il fallait même s’attendre à ce que les personnages de la crèche s’en mêlent.

    Et bien, il n’en est rien. La tradition des santons campe sur ses positions. En cherchant bien, nous avons repéré cependant dans la PQR un motif de ne pas désespérer. Nice Matin, le 17 décembre, nous signale ce dépoussiérage santonnier par le truchement d’une photo DR.

    santons gilets jaunes.jpg

    Victor Hugo avait coutume de dire qu’il fallait mettre un bonnet rouge au dictionnaire, Jean-Pierre Fiori (ou Jean-Louis si, comme il est possible, il y a erreur sur le prénom) enfile des gilets jaunes aux figurines d’argile provençales. Un exemple à suivre ?

    Merci à M. Fiori (quel que soit son prénom), postier vençois, d’avoir eu cette idée et merci au journal qui l’a popularisée.

    Lien permanent Catégories : Les mots pour le dire, Poignées d'humour 2 commentaires Imprimer
  • ISF CLUB

    Paris murmure.

    Entre deux karchers, ce tout petit pochoir sur la façade cossue d’un gros immeuble de la très clean avenue de Breteuil.

    Photo0234.jpg

    Une ironie d’autant plus grande qu’elle a tout pour passer inaperçue.

    Lien permanent Catégories : Microcosmes, Poignées d'humour 0 commentaire Imprimer
  • Une langue en marche

    Charabia et Galimatias servis sur les plateaux de télé pendant (le début de) la révolte des Gilets jaunes

    gilet LV.jpg

    Il y a des questions cognitives de mécompréhension

    Nous sommes en mesure de prendre des mesures exceptionnelles

    Il faut réfléchir en périmètre de l’action de l’Etat

    Le chiffre d’affaire est homothétique à la fréquentation

    La fraude fiscale ça fait partie de notre volonté et nous y travaillons

    La bascule du CICE va générer un point de pic

    Ce n’est pas aux classes moyennes de payer pour les classes moyennes inférieures

    Il faut avoir en tête l’équation budgétaire

    Nous vous demandons en responsabilité d’être raisonnables

    Des modalités seront effectives

    Une augmentation des petites taxes moyennes

    L’élargissement du chèque carburant

    Une réforme structurelle sur la sphère sociale

    Il faut réinnerver les collectivités régionales

    C’est le même logiciel, les bénéfices sont explosés

    Comment on interpelle un débat citoyen avec une ingénierie ?

    Lien permanent Catégories : Fragments, Les mots pour le dire, Poignées d'humour 0 commentaire Imprimer
  • Londres à Cayenne

    Retour Au bagne. Par la lecture. Celle du grand journaliste Albert Londres.

    portrait_albert_londres.jpg

    Son reportage de 1923 sur la Guyane. Avec ce livre et avec L’Homme qui s’évada (1927), il contribua à la fermeture du pénitencier de Cayenne.

    londres-albert-l-homme-qui-s-evada-10-18-livre-251818871_l.jpg

    Dans ces ouvrages, réunis dans la Collection 10-18 avec une introduction de Francis Lacassin, Londres prend fait et cause pour Albert Dieudonné (1884-1944).

    photo dieudonné.jpg

    Cet ébéniste anarchiste fut condamné sur des présomptions et des témoignages douteux. Pour une participation (jamais prouvée) au braquage de la banque de la rue Ordener commis par la Bande à Bonnot que Dieudonné fréquentait sans en faire vraiment partie.

    Bande_a_bonnot.jpg

    Dans Au bagne, on croise aussi, Jean De Boë (1889-1974), un autre ouvrier anarchiste, impliqué dans les actions illégalistes de l’époque.

    De_Boe_Jean.jpg

    Supposé complice des « bandits tragiques », ce typographe en sabots figure sur une vieille carte postale montrant le départ des forçats pour l’Ile de Ré, première étape de leur calvaire.

    embarquement.jpg

    A son propos, Albert Londres -pourtant peu prolixe sur les travaux d’art des bagnards- note un fait curieux. Pour un autre prisonnier et sur « une lampe faite dans un coco », « de Boué (sic) de la bande Bonnot avait gravé (peut-être avec son surin) un des plus beaux versets des psaumes ».

    La remarque prend tout son sel quand on sait que ce compagnon de détention n’est autre que Benjamin Ullmo (1882-1957), officier condamné à la déportation à vie pour avoir dérobé et voulu vendre des secrets militaires dans une intention cupide.

    benjamin ullmo.jpg

    Ce « traître », trahi par la femme pour laquelle il se ruinait, fut sauvagement sevré de sa toxicomanie à l’opium. Il resta 8 ans seul sur l’île du Diable où il faillit devenir fou. Ironie du sort : Ullmo occupa la case du Capitaine Dreyfus alors gracié.

    Dreyfus_Ile_du_diable.jpg

    Si Dreyfus était innocent et Ullmo coupable, tous deux étaient gradés et juifs. La conduite répréhensible du second offrit donc aux antisémites une occasion de reprendre leur calomnies. « On a été traître comme on a été ivre. Je suis dégrisé, croyez-moi » déclara Ullmo qui réussit à se réhabiliter. Non sans passer par une crise mystique et une conversion au catholicisme mal vécue par sa famille restée en France. De ce point de vue, il est significatif de constater que le psaume gravé pour lui par De Boë : « Si l’Eternel ne bâtit la maison » (cantique des degrés de Salomon) fait partie d’un recueil rejeté de la Bible officielle du judaïsme et du christianisme.

    l'internationale intersticielle,albert londres,cayenne,au bagne,albert dieudonné,jean de boë,benjamin ullmo,capitaine dreyfus,jacques brunius,lucienne boyer

    Ne quittons pas cette note et le bagne sans signaler que l’on peut voir Dieudonné dans le documentaire-fiction de Jacques Brunius intitulé Autour d’une évasion (1931). On y entend La Belle, chanson réaliste d’Albert Londres interprétée par Lucienne Boyer.

    tatoo.jpg

    On y déroule le plastron de Robert le tatoué, long morceau de peau humaine historiée prélevée sur la poitrine d’un bagnard.

    Lien permanent Catégories : Ecrans, Flonflons, Les mots pour le dire 3 commentaires Imprimer
  • Les Petites feuilles de Cingria

    « Nous avons le plaisir d’annoncer la très prochaine causerie de notre ami le Dr Ferdière, dir. de l’Asile de Rodez, sur un sujet qui nous touche de près : Nous sommes tous fous. »

    Annonce parue le 27 avril 1942 dans le numéro 4 des Petites feuilles, revue minuscule et éphémère en grande partie rédigée par l’érudit cycliste et écrivain vagabond Charles-Albert Cingria (1883-1954), un des plus novateurs auteurs de la Suisse romande et de la langue française, ami du peintre Jean Dubuffet qui fit de lui des portraits conformes à sa nature insaisissable.

    cingria par dubuffet.jpg

    Nature qui transparait dans la Lettre à un jeune homme publiée dans les Œuvres complètes de l’écrivain suisse (tome XI) : « Je ne suis pas un nom : il n’y a que la vie qui m’intéresse – les maisons, les arbres, les chats, les rues, les visages, les jambes etc. (…) Et puis je n’aime pas qu’on m’aperçoive : j’aime filer anonyme et invisible, et puis m’enfermer chez moi et me passionner (…) sur des points d’histoire (…) ou de science sur lesquels je n’ai rien à déclarer hormis l’emploi que j’en fais dans une rédaction qu’on m’arrache (…) ».

    l'internationale intersticielle,Dr Gaston Ferdière,Charles-Albert Cingria,St Saphorin,Auberge de l'onde

    Un tel homme était fait pour une telle revue d’un si subtil décalage historique qu’on la dirait en apesanteur. Fondées avec le concours de Géa Augsbourg et de Paul Budry, les Petites feuilles détonnent dans le climat lourd de la guerre à laquelle elles semblent tourner volontairement le dos.

    couv petites feuilles.jpg

    « Elles n’étaient l’organe d’aucune autre collectivité que celle des amis habitués de l’Auberge de l’Onde, à Saint-Saphorin et présentaient, illustrées, des nouvelles, de la critique littéraire, artistique et musicale, des horoscopes, des annonces, bref, un tas de choses. ».

    st saphorin.jpg

    auberge-de-l-onde-sepia.jpg

    D’un format et d’une allure modeste, ces Petites feuilles ne comportèrent que 5 numéros (entre novembre 1941 et octobre 1942) privilégiant en apparence le petit bout de la lorgnette. « Pas de politicaille débilitante » proclame l’éditorial inaugural, « En aucune occasion surtout le genre petit saint ».

    PF.jpg

    Cela n’empêche pas, au printemps 1942 (c’est à dire avant la Rafle du Vel d’Hiv) cette précision d’importance sous le titre Pas de question juive : « Il n’y a pas plus de question juive que de question chrétienne, n’est-ce pas frères chrétiens ? Il n’y a question que de la crapule. Nous pourrons donc ouvrir la question juive le jour où la dernière crapule dite chrétienne aura été collée au poteau ».

    causerie.jpg

    Lien permanent Catégories : Fragments, Hommes non illustres, Les mots pour le dire 9 commentaires Imprimer